Centre Interdisciplinaire de Recherche sur l'Afrique et le Moyen-Orient

Pour une société plus juste par l’éducation

« Une injustice commise quelque part est une menace pour la justice dans le monde entier » Martin Luther King (1929 – 1968)
Le meurtre récent de George Floyd par un policier de Minneapolis en a troublé plus d’un, comme en témoignent les multiples manifestions qui s’organisent depuis à travers le monde. Par mon autre « chez moi », on dit que la moindre des choses qu’on peut/doit faire face à une injustice qu’on ne peut régler c’est de la dénoncer. Celle qui justifie la présente sortie s’est certes déroulée de l’autre côté de la frontière, mais cela n’a pas empêché un grand nombre de personnes de se lever ici pour la condamner. C’est tout à leur honneur.
 
La violence raciste, qu’elle soit perpétrée contre les Noirs, les peuples autochtones au Canada ou tout autre groupe de la société ne doit pas être tue. En temps de crise, elle semble être plus exacerbée. Les expériences de racisme sont très réelles pour les nombreux étudiants, professeurs et membres du personnel.
Le milieu de l’éducation, particulièrement, a un rôle majeur à jouer dans le combat contre l’injustice au regard de sa mission de socialisation et de formation des jeunes et des moins jeunes. Comme faculté d’éducation, nous nous trouvons aux avant-postes de cette bataille avec la formation des enseignants.
 
J’avoue être quelque peu troublé par le silence assourdissant d’une partie du milieu universitaire face à la flagrante, criante, énorme, navrante, affreuse, effroyable, révoltante et cruelle injustice à laquelle le monde a assisté. On en était encore à chercher des explications, si ce n’est des excuses. À la règle du Rasoir de Hanlon (1980) préconisant de « ne jamais attribuer à la malveillance ce que la bêtise suffit à expliquer », je réponds que la permanence de la bêtise la transforme en malveillance. Doit-on endurer et regarder ailleurs, en attendant à la prochaine abominable injustice ?
 
Au-delà des énoncés et des symboles
En tant qu’une des plus importantes communautés universitaires de la province, nous avons encore beaucoup de travail à faire pour démanteler les barrières structurelles et le racisme qui s’y déploient.
Je me suis réjoui, ces dernières années, de nombreuses initiatives visant à mieux préparer et outiller nos futur-es enseignant-es en formation à l’enseignement à comprendre et répondre aux besoins et aux expériences d’un public d’apprenant-es qui s’est fortement diversifié.
De la même manière, j’ai salué les politiques volontaristes en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI) au bénéfice du personnel universitaire issu de ses diverses communautés minoritaires.
 
Force est de reconnaitre que les gestes discriminatoires continuent de se perpétuer dans nos communautés et nos écoles. Pour les contrer, il convient de continuer de :
… témoigner de notre engagement en faveur d’un enseignement et d’un apprentissage antiracistes et anticoloniaux
… garantir un environnement d’enseignement, d’apprentissage et de recherche exempt de racisme, de discrimination et d’iniquité 
… jouer pleinement notre rôle de barrière aux grandes injustices comme aux micro-agressions du racisme et de la discrimination ordinaires par l’éducation.
 
Pour une société plus juste et plus équitable
Un tel travail pour plus de justice exige que nous reconnaissions le racisme systémique qui gangrène notre société et que nous agissions en leaders éthiques promoteurs d’une société plus juste.
En tant que faculté d’éducation, nous avons le devoir moral de lutter et soutenir la résistance au racisme et à la discrimination.
 
Ouvrons donc la conversation !
 
Par l’éducation, déconstruisons les schèmes et cassons les chaînes de l’injustice. Prenons nos responsabilités dans la promotion de la justice raciale. Levons-nous toutes et tous comme un seul et pour hurler, nous opposer, protester, nous révolter collectivement. Je ne pense pas là à des déclarations génériques et insipides recyclées pour la circonstance, mais plus à un positionnement ferme, à des engagements et des gestes concrets pour montrer notre ras-le-bol. Car, pour reprendre Eric Hobsbawm, « le monde ne guérira pas tout seul [de l’injustice sociale] ».
 
Nous n’avons pas de plus grande urgence ni de plus grand combat ! 
 
Abdoulaye Anne, Professeur agrégé au Département des fondements et pratiques en éducation et membre titulaire du CIRAM.
Avec le soutien du CIRAM